Un point pour les débutants ?
L’apprentissage du Kyusho-jutsu dans notre école commence toujours par les restaurations. Et en tout premier lieu, nous apprenons à restaurer les dysfonctionnements de niveau 1, courants dans la pratique. L’usage veut que l’on s’appuie souvent sur le point GI10 pour expliciter aux débutants le fonctionnement et les effets d’un point, ainsi que les moyens de le restaurer. Ceci n’est pas sans raison pédagogique. Tout d’abord il s’agit d’un point des bras, le niveau qui suit celui des restaurations de base. Ensuite, c’est un point assez facile à mobiliser, et qui cache de nombreuses ressources, que nous allons effleurer dans les ligne qui suivent.
Approche traditionnelle du point GI10
Du point de vue de la médecine énergétique chinoise, le point GI10 est le dixième point du méridien du Gros-Intestin (GI), nommé « Shou San Li » (Shǒu Sān Lǐ; 手三里) ou « Trois miles du bras » ou « Trois mesures du bras ». Le méridien du GI (yang) est couplé au méridien du Poumon (yin). Tous deux appartiennent à l’élément Métal, à la saison automne, contrôlé par l’élément Feu (C, Ig notamment) et contrôlant l’élément Bois (F, Vb).
Les fonctions traditionnelles attribuées au point GI10 sont de réguler le Qi et le sang, d’activer le méridien du GI et de soulager les douleurs, d’harmoniser les intestins et l’estomac. A l’instar du point E36 qui régule les troubles des membres inférieurs, le point GI10 régule les troubles des membres supérieurs. Parmi eux, on trouve le trouble dit Wei Zheng (Wěi Zhèng; 痿证) qui est une faiblesse des membres, avec perte de contrôle, de tonus musculaire, pouvant aller jusqu’à la dégénérescence et l’atrophie. Plus simplement, GI10 est utilisé en combinaison, pour traiter les incapacités motrice et l’engourdissement du bras, voire les tennis-elbow. Pour ceux qui ont déjà connu une frappe ou pression sur ce point, ces effets sont parfaitement connus ! 😁 Ce qui illustre un des principes action/restaurations du Kyusho-jutsu. A bon entendeur…
Localisation et utilisation du point GI10 en Kyusho
Le point GI10 est situé en énergétique classique sur la partie supérieure de l’avant-bras, à 2 cun du pli du coude, SUR le muscle long extenseur radial du carpe. L’insertion de l’aiguille d’acupuncture se fait perpendiculairement et le point est réputé être situé à 1 à 2 cun de profondeur depuis la peau. Dans cette localisation usuelle, une branche profonde du nerf radial est sollicitée, là où le nerf se sépare en Y, en surface du muscle long extenseur. Le nerf est donc facilement mobilisable, en dépit de l’effet coussin amortisseur du muscle lors d’une frappe. Sur une pression, le muscle peut rouler sous les doigts, ce qui rend le nerf plus difficilement actionnable. En outre, cette localisation ne comporte pas de réseau sanguin majeur, donc pas d’effet sur celui-ci, sauf à remonter plus haut vers le coude pour mobiliser la veine céphalique accessoire.
En Kyusho-jutsu, le point GI10 est plus souvent localisé ENTRE le long extenseur radial du carpe et le muscle brachio-radial. L’angle d’activation est toujours de 90°, et sa position longitudinale est toujours à 2 cun du pli cubital. Cette localisation permet de passer entre les faisceaux musculaires si l’on utilise une zone de frappe suffisamment petite (d’où toujours dans les disciplines orientales l’usage d’armes naturelles variées et de formes «exotiques» pour les néophytes), et «d’écraser» les réseaux nerveux et sanguins sur l’os radius, augmentant ainsi les effets du coup ou de la pression. Le muscle long extenseur ne joue plus l’effet coussin amortisseur comme dans la localisation traditionnelle. L’action pénétrante atteint de cette manière le nerf musculocutané du bras, ainsi qu’une branche superficielle du nerf radial. Elle possède également une action sur l’irrigation sanguine à travers l’artère et la veine radiales. Ceci crée une grande différence, notamment en pression.
Une zone sensible plutôt qu’un point
Cette localisation explique également la sensibilité des points GI9 et GI8 respectivement à 1 et 2 cun de GI10 en direction du poignet. Ces points sont bien situés sur le nerf musculocutané et la branche superficielle du nerf radial, formant, avec GI10, une large zone d’attaque, facile et efficace, aux points interchangeables et cumulables. D’où des frappes possibles avec des surfaces larges, mais pénétrantes, comme le poing dit en marteau (Tetsui). L’angle et la qualité de frappe sont alors essentielles pour provoquer l’effet voulu, qui peut aller de la simple douleur, à l’engourdissement, voire à l’évanouissement.
En pratique évidemment, la sécurité est une rigueur absolue. L’entrainement traditionnel, avec ses niveaux de contrôle imposés et cadrés dans des exercices spécifiques, permet de développer la sensibilité et la finesse motrice nécessaires, tout autant que de produire le volume d’entrainement nécessaire à l’automatisation technique. Pour le respect de chacun. Le Kyusho-Jutsu est un art de préservation de la vie, avant tout, à fortiori celle de notre partenaire qui s’offre gentiment pour notre apprentissage.
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